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History

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Qu'est-ce qu'être un bon contemporain

Argument : Une grande partie des activités humaines peuvent être entendues comme des tentatives de synchronisation : l’homme veut faire partie de son temps. Rien n’est pire que de n’être “plus dans le coup”. En s’interrogeant sur ces techniques d’harmonisation entre le temps présent et le temps projeté, entre le lieu vécu et le lieu rêvé, nous pourrons comprendre, au-delà de ce que les sociétés font, ce qu’elles “veulent faire”.

Qu'est-ce qu'une époque

Être un bon contemporain, c'est d'abord être synchronisé avec son époque (c'est l'acceptation de son environnement qui fait de nous un contemporain). Au contraire se désynchroniser, être dépareillé procure le sentiment d'être dépassé, marginal, à l'écart.

Un bon contemporain sait lire dans les époques. Mais il n'est pas obligé d'en suivre le mouvement. Le présent se constitue d'éléments non-advenus que le contemporain fait jaillir des époques. Le bon contemporain n'est en marge que par le choix d'apporter des croisements inédits entre plusieurs images. Ces images appartiennent aux imaginaires passés, aux mythes et aux époques.

Quand la diversité s'agrandit, l'époque évolue.

https://www.youtube.com/watch?v=vxlNw-vz7l8

Je m'interrogeais sur la possibilité de travailler avec Franck Ghitalla dans "l'écriture" de ce livre. Si il nous faut parfois prendre des directions, des entre-croisements, des chemins, la cartographie pourrait être un moyen de créer un livre ubiquiste. Capable de retracer nos accords (synchronies) mais aussi leurs dissonance. Si nous voulons comprendre notre époque, il nous faut en saisir ses multiples nuances. L'harmonie se décompose toujours.

"Il faut du chaos en soi pour faire naitre une étoile qui danse." Friedrich Nietzsche.

"Un livre c'est une tentative d'ordre sur le désordre." Sylvain Tesson.

Mais qu'est-ce qu'une époque? L'époque après la Seconde Guerre mondiale...

“Une épistémè, c’est la confluence des mots, des choses et des actes” Michel Foucault

Une époque, c’est une parenthèse.

"Le Zeitgeist, l’âme sentante dans laquelle prend ses origines le geste philosophique" Georg Wilhelm Friedrich Hegel

…Aeon / Paradigme / Genius Seculi…

“Le siècle appartient au principe, et non pas le principe au siècle. Le principe fait l'histoire et non pas l'inverse.” Karl Marx

“L’imaginaire, c’est l’ensemble des images et des relations d’images qui constitue le capital pensé de l’homo sapiens” Gilbert Durand

En réalité, l'époque se définit par son mythe, par une idée omniprésente qui se diffuse à travers l’état d’esprit collectif, propre à une époque déterminée. Hegel (1770-1831), philosophe allemand, avait déjà remarqué cette particularité qui permettait de définir une époque. Il l'a appelé « âme sentante », le Zeitgeist, _littéralement le "fantôme du temps"._

On peut aussi parler d'Æon, ensemble de valeurs qui parcourent le temps.

Ces "valeurs" sont intemporels, multiples, diffuses et succinctement dans l'instant. Le Zeitgeist est un parfum que chacun partage mais que peu prennent le temps d'explorer. Le fantôme s'apesante des principes pour comprendre les époques. Karl Marx parle, lui, de génie du siècle. "Le siècle appartient au principe et non pas le principe au siècle. Le principe fait l'histoire et non pas l'inverse."

L'imaginaire c'est un ensemble d'éléments de valeurs qui vont produire dans le réel.

Gilbert Durand, résistant de la première heure qui a passé plusieurs années dans les prisons allemandes, affirmera à son retour que l'imaginaire est bien un phénomène social.

"L'imaginaire, c'est l'ensemble des images et des relations d'images qui constitue le capital pensé de l'Homo Sapiens" Gilbert Durand

Nous sommes les agents qui incarnent les valeurs d'une époque. Le siècle exprime ses valeurs par le dessous.

Pour le comprendre, nous pouvons prendre en exemple les différents imaginaires qui ont façonné la médecine :

Le modèle hydraulique. C'est l'afflux du sang qui est la cause des maladies du corps. Alors à l'époque, on pratique des saignées, on fait appel aux sangsues...

Le modèle automatique. Le corps est une machine. La pensée mathématique et les systèmes d'horlogeries influencent cet imaginaire

  • Le modèle énergétique, qui fait part belle à la chimie (électrochocs)
  • Le modèle communicationnel, où nous sommes régis par nos humeurs via le cerveau, comme pièce maîtresse
  • Le modèle quantique, qui nous fait considérer le corps comme un tout qui fonctionne dans son ensemble

L'imaginaire des Grecs anciens

Comprendre son époque signifie aussi vivre à travers ses mythes et saisir ce qu'ils disent de leur époque. Le mythe le plus connu de la mythologie, l'Odyssée, écrit par Homère au VIIIe siècle avant J-C, véhicule toutes les valeurs de son époque :

Les Grecs vivent sous l'égide de quatre grandes valeurs

  1. Les Dieux veulent la guerre / les hommes aiment la guerre
  2. La mesure et le destin
  3. La part des Dieux: accepter qu’une partie de ce qu’on produit ne nous appartient pas
  4. L’hospitalité héréditaire. Chez les Grecs, on reçoit d'abord, on s'enquière d'une demande ou d'informations ensuite.

Mais quel est l'imaginaire de notre époque? C'est en cherchant les mythes dans lesquels on se reconnait que l'on peut trouver une réponse; le principe de la mythanalyse.

_ «Lire l’époque au travers des mythes dans lesquels elle se reconnaît.»_Gilbert Durand

Notre imaginaire après la seconde guerre mondiale

Diviser pour vaincre, diviser pour comprendre de René Descartes, diviser pour régner de Machiavel, diviser pour produire de Taylor, diviser pour habiter de Marx (la valeur du travail, le travail comme destin, tripalium/oper)... Inconsciemment, ces divisions ont été le leitmotiv de la modernité.

Modernité, qui est une rationalisation socio-technique, déterminée par une domination et une division. David Riesman parle de "Foule Solitaire", Albert Camus décrit "une fourmilière d'hommes seuls", Martin Buber parle quand à lui de Solitude collective.
Pour Augustin Berque : la modernité c'est le vrai, c'est le beau, c'est le bien.

Mais notre monde se métamorphose, sous l'impulsion de révolutions minuscules.

Nous sommes passés d'une économie d'abondance à une économie de la rareté. L’énergie était perçue comme symbole de puissance, de pouvoir : il fallait montrer qu'on la dépensait, laisser toutes les lumières allumées. Aujourd’hui la multiplication des biens et des moyens d’accès ont accentués l’effet de demande : plus nous avons, plus nous voulons, et nos désirs sont plus grands que ce nous pouvons réellement avoir.
Notre production se tourne vers le localisme et fait par belle au crowdfunding. L'impression 3D change nos façons de faire. Le Travail évolue, et la valeur différentiante s'oppose à la valeur complémentaire. Les entreprises ne sont plus vues comme comme pourvoyeuses mais prédatrices (bullshit jobs).
Notre rapport à la possession change, nous n'accumulons plus, nous voulons créer de la valeur. Notre savoir commun grandi, de jour en jour, si bien qu'en 2012, nous avons produit plus de data que dans toute l’histoire de l’humanité.

En 2003, Marcel Bolle de Bal fait émerger 3 notions sociologiques

  • la déliance
  • la reliance
  • la liance

Nous pouvons définir notre époque comme un système d'alliance et de reliance, qui cherche à lier, relier ce qui avait été divisé, mais nous n'avons pas encore trouvé notre mythe fondateur, ce qui nous plonge dans une attente collective.
Tout ce qu'on peut en dire, c'est qu'il est caractérisé par un certain désenchantement, une synthèse entre l'archaïque et le développement de la technologie et de la technique, une curiosité de faire et de connaître, la prise de conscience des limites du monde.

  • Economie: Abondance et rareté. L’énergie est perçue comme symbole de puissance, de pouvoir : il fallait montrer qu'on dépensait de l’énergie, laisser toutes les lumières allumées. Aujourd’hui: Nous sommes dans l'économie de la rareté : la multiplication des biens et des moyens d’accès accentue l’effet de demande : plus nous avons, et plus nous voulons. Position de rareté. Nous sommes passé d'un imaginaire de l’abondance à un imaginaire de la rareté.

  • Production: Localismes, crowd funding, impression 3D.

  • Travail: La valeur différentiante s'oppose à la valeur complémentaire.

  • Possession: Trésor caché vs Transit: accumuler vs produire de la valeur.

  • Savoir: Nous avons produit plus de data en 2012 que dans toute l’histoire de l’humanité.

  • Citoyenneté: émancipation vs relation.

  • Entreprises: Pourvoyeuse vs Prédatrice ( bullshit jobs)

Le but de l'art moderne n'est pas d'être beau mais de créer un débat, c'est le débat qui fait l'oeuvre. Nous entrons dans une zone de haute pression imaginaire.

Comment connaître son époque ? sanctifier et dévoiler

Resynchroniser la société et le mythe